Chypre, Grèce, Italie, Espagne, Irlande, Portugal et maintenant la France. Cela fait à présent plus de 2 ans que les médias n’arrêtent pas de nous en parler. La crise que l’Europe est en train de traverser met en danger nos économies.
En France, deux ministres n’ont pas hésité à parler de faillite de l’Etat : François Fillon, premier ministre en 2007, et Michel Sapin, Ministre du travail en 2013. Pourtant, peut – on dire que l’Etat français est en faillite ? Hintigo fait le point avec vous !
Etre en faillite, qu’est ce que cela signifie ?
Il convient tout d’abord de définir la faillite. En règle générale, on utilise ce terme pour les entreprises ou individus qui sont dans l’impossibilité de payer leurs dettes et leurs factures. Une procédure judiciaire est alors mise en place pour liquider l’agent et rembourser au moins une partie des créanciers. Or, dans le cas d’un Etat, il n’est pas possible de recourir à telle méthode.
C’est pourquoi le terme qu’il faudrait utiliser est la cessation de paiement. Un Etat se déclare en cessation de paiement lorsqu’il ne peut plus faire face à ses dettes. Il semble important de rappeler que cette situation n’est pas propre à l’Europe : de nombreux pays tels que le Mexique (années 80), l’Argentine (2001 – plus de 130 milliards de dollars de prêts), informellement les Etats-Unis (dévaluation de la parité or/dollar en 1933 et 1971), entre autres, ont connu des cessations de paiements et s’en sont sortis. La relecture des crises de paiements des trente dernières années vous aidera surement à relativiser la situation actuelle par laquelle la France est en train de passer.
Pourquoi un Etat entre-t-il en « faillite »?
Selon le système monétaire et financier, chaque pays est différent. Dans le cas français, il s’agit de déficits budgétaires et commerciaux ainsi qu’un accroissement de la dette publique. Le risque d’une cessation de paiements est un risque systémique qui peut paralyser toute l’économie : un Etat ne remboursant pas ses dettes, met son système financier et les épargnants nationaux en danger.
En plus de la perte de PIB, les conséquences sociales en termes de chômage, pauvreté et d’accroissement des inégalités sont parfois dévastatrices. Dans le cas européen, la peur du risque systémique et de l’effet de contagion rendent la cessation de paiement d’un état membre de la zone euro encore plus dangereuse. Pour l’instant, nous ne pouvons pas qualifier l’Etat français comme un pays en faillite puisqu’il ne s’est pas déclaré en tant que tel.
Bien que différentes agences de notations ait réduit le fameux AAA, la France continue à s’approvisionner en capitaux sur les marchés financiers à des taux relativement bas (taux obligataires sur une échéance à 10 ans est passé en dessous de la barre des 2% à la fin de l’année 2012). Ce qui montre une relative confiance de la part des investisseurs dans la capacité de remboursement et restructuration de l’Etat français. Afin de comprendre plus facilement les raisons qui mènent un Etat à déclarer cessation de paiements, nous vous conseillons de regarder la vidéo de Dessine moi l’éco ci-dessus !
Que se passe-t-il lorsque l’Etat est en « faillite » ?
Le gouvernement au pouvoir se trouve alors dans l’obligation de réaliser un ajustement à la baisse des prix réels. Comme cela a été le cas pour de nombreux pays tels que le Mexique, l’Argentine et les Etats-Unis, l’Etat en cessation de paiements peut effectuer une dévaluation de sa monnaie.
Cela renchérit certes ses importations et risque d’accroitre l’inflation à court terme. Mais à long terme, lorsque la demande devient plus élastique aux prix, cette mesure tend à favoriser les industries exportatrices. Toutefois, le cas de la France est différent car étant membre de la zone euro, elle a abandonné toute souveraineté sur sa monnaie et se retrouve dans l’impossibilité de faire une dévaluation. C’est pour cela qu’elle doit effectuer un ajustement à la baisse des prix réels internes.
Du fait de son appartenance à la zone euro, la France ne peut pas réaliser une politique monétaire expansionniste (accroissement des liquidités disponibles dans l’économie pour faire face aux impayés) car celle-ci dépend de la Banque Centrale Européenne qui craint que l’inflation porte préjudice à la reprise économique en créant une spirale inflationniste. C’est pourquoi elle réalise à présent, tout comme ses voisins européens, une politique d’austérité qui vise à réduire ses dépenses publiques et augmenter ses recettes (notamment en luttant contre l’évasion fiscale). La mise en place de réformes lui permettrait de redynamiser son économie et notamment ses exportations.
Les particuliers ont quant à eux la possibilité de protéger leur patrimoine en se réfugiant vers les actifs réels et non monétaires tels que l’or, les œuvres d’art et l’immobilier. Mais en faisant cela, ils risquent aussi de provoquer la chute du système en réduisant le peu de liquidités déjà présentes sur le marché.
Par conséquent, il est erroné de dire que la France est en faillite. Elle n’a pas déclaré cessation de paiements et les marchés continuent à lui prêter de l’argent à des taux relativement bas. L’impossibilité d’être indépendante du point de vue de sa politique de change et monétaire la contraind à adopter des mesures d’austérité budgétaire, en particulier dans ses dépenses publiques et sa lutte contre l’évasion fiscale, dans le but de retrouver la confiance des marchés, stabiliser sa situation budgétaire et éviter ainsi d’être en faillite. Toutefois, les politiques d’austérité budgétaires ont des conséquences économiques (restriction de la demande interne, restructuration des secteurs de l’économie, etc.) et sociales (chômage, pauvreté, inégalités) parfois dramatiques qui peuvent mettre en danger la reprise de la croissance économique.