03 Jan, 2017 - 10:20
Comprendre la notion de droit à la déconnexion créée par la Loi Travail du 8 aout 2016
Avoir un ordinateur portable ou un téléphone professionnels était considéré il y a quelques années comme un bonus. Depuis, l’économie est entrée dans l’ère du numérique et ces équipements, qui étaient synonymes d’autonomie, sont devenus aujourd’hui un lien permanent entre l’entreprise et le salarié.
Pour protéger le salarié de l’empiètement du numérique professionnel dans sa sphère privée, la loi Travail a créé un nouveau principe : le « droit à la déconnexion ».
Droit à la déconnexion : définition ?
Nombreux sont les salariés qui répondent à leurs emails professionnels le soir, à des appels de collègues ennuyés sur un dossier pendant un jour de congé, à une sollicitation du supérieur hiérarchique en catastrophe dans un transport sur le trajet du retour à la sortie du travail. Les nouveaux modes de communication créent des sollicitations permanentes, et surtout une sorte de « droit à réponse immédiate ». C’est pour mettre un frein à cette dérive, qui fragilise la qualité des temps de repos et la vie familiale du salarié, que la loi Travail a créé le droit à la déconnexion. Ce dernier renvoie à :
- Un droit dont le salarié pourra se prévaloir sans qu’il lui soit reproché de ne pas répondre aux sollicitations de son employeur en dehors de son temps de travail
- Une obligation pour les entreprises de plus de 50 salariés d’engager, dans le cadre de la négociation annuelle obligatoire (NAO), une négociation relative aux moyens pouvant être mis en œuvre pour réguler l’usage des outils numériques
- Une obligation pour les entreprises de plus de 50 salariés de mettre en place les actions de formation et de sensibilisation visant une utilisation raisonnable des équipements numériques.
Le droit à la déconnexion aide ainsi à réguler l’utilisation des outils de communication numériques afin que la frontière entre vie privé et vie professionnelle ne soit pas brouillée chez les travailleurs. Elle permet donc de prévenir le stress lié au travail, la fatigue ainsi que ses conséquences dramatiques telles que le burn-out (épuisement professionnel).
Ce droit permet « d’assurer le respect des temps de repos et de congé ainsi que de la vie personnelle et familiale« . En d’autres termes, elle permet aux employés de ne pas utiliser d’outils numériques lorsqu’ils ne travaillent pas. Cela signifie que les employeurs ne peuvent pas contacter les travailleurs durant les moments suivants : les congés payés, les jours d’RTT, les week-ends… Cela limite ainis le nombre de SMS et d’emails envoyés aux employés.
Mise en œuvre pratique
L’article 55 de la Loi Travail, proposée par Myriam El Khomri, contient un chapitre nommé « Adaptation du droit du travail à l’ère du numérique. ». Le droit à la déconnexion entre dans ce cadre. Par ailleurs, ce nouveau dispositif s’est également inspiré d’autres rapports : le rapport de Bruno Mettling (« Transformation numérique et qualité de vie au travail ») et Pascal Terrasse (sur le développement de l’économie collaborative). La loi ne fait que poser ce nouveau principe qu’est le droit à la déconnexion. Il revient à chaque entreprise de définir les modalités d’encadrement du recours et de l’utilisation des équipements numériques.
A savoir : Les obligations relatives à la prise en compte du droit à la déconnexion concernent uniquement les entreprises de plus de 50 salariés. Pour les entreprises dont l’effectif est inférieur, il n’y a aucune disposition légale, mais il n’est pas exclu que peu à peu les représentants du personnel (délégués du personnel notamment) se saisissent également de cette question d’une importance majeure pour le bien-être des salariés.
Les dispositions relatives au droit à la déconnexion sont entrées en vigueur ce 1er janvier 2017. Les entreprises devront l’aborder lors des négociations annuelles obligatoires.
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Morgane De Abrantes Morgane De Abrantes est juriste spécialisée en droit social et germanophone. Curieuse et active, elle s'intéresse à la matière juridique au sens large (droit des contrats, droit bancaire) et enrichit son expérience professionnelle par des missions dans différents domaines (enseignement, rédaction, consulting).